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Le jour. D'après fred sabourin
Articles récents

J’ai noyé le sapin

6 Janvier 2015 , Rédigé par Fred Sabourin Publié dans #Lettres à ...

 

 

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Ma fille, je te demande pardon, mais ce matin, j’ai noyé le sapin. Celui que nous avions choisi et acheté ensemble il y a un mois, sur le parking de l’hypermarché. Puis chargé dans le coffre de la voiture. Puis monté dans le salon, et décoré ensemble avec les guirlandes et boules de circonstances. Je revois ta joie et tes sautillements devant l’arbre de Noël. L’attente du jour J – sans excitation particulière – et celle de tes grands yeux bleus perçants lorsque tu as découvert les papiers cadeaux à son pied. Ce sapin, qui sentait bon, je l’ai jeté ce matin, après l’avoir mis à nu hier soir, rangé boules et guirlandes dans le carton qui va redescendre dans le silence noir et frais de la cave pour sa gestation annuelle de onze mois.


Comme il perdait beaucoup d’aiguilles et que je ne voulais pas salir tout l’appartement, je l’ai passé par la fenêtre. Il est allé s’écraser, trois étages en dessous, sur le trottoir de la rue. J’ai eu l’impression de défenestrer un ami. Pourtant sa chute a été légère, presqu’aérienne, ça m’a surpris. En touchant le sol, le tronc a fait un petit « ploc ! » et tout le reste de ses aiguilles est tombé. Là, il fut vraiment à poil, dans le petit matin froid de janvier. Vite, vite, j’ai descendu quatre à quatre les escaliers pour aller le récupérer, et l’emmener, comme chaque année, vers la Loire, où l’attendait son funèbre bain mortel. Je sais, ce n’est pas bien de jeter son sapin dans la Loire, les habituels donneurs de leçon et ayatollahs de l’écologie et du développement durable vont me tomber dessus, aussi emmerdants en 2015 qu’ils ne l’étaient en 2014. Je m’en fous, je n’irai pas à Paris en décembre prochain écouter le Président parler de sa nouvelle danseuse, avec son danseur étoile préféré un ex-animateur télé adepte du kytesurf à Saint-Lunaire, dans une énorme baraque face à la mer achetée avec les royalties de gels douche merdiques qui collent à la peau et coûtent celle des fesses.


J’ai descendu le petit chemin qui mène au fleuve. Dans la semi-obscurité du jour naissant, entre chien et loup, j’ai entendu des canards s’envoler. Prudemment je me suis approché du bord – la Loire c’est dangereux disent les gens d’ici qui ne s’y baignent pas – j’ai empoigné solidement le haut et la base du tronc et hop ! à la baille. Il a fait un petit « plouf » et a à peine coulé. Il est resté près du bord, le courant l’emportera – ou pas – quand il le décidera. Et je suis resté là, comme un con, à regarder mon sapin nu flotter comme un bouchon au bout d’une ligne de pêche. Une tristesse m’a soudainement envahit, la mélancolie des lendemains de Noël, celle, sombre, tranchante, grise et froide comme l’acier des débuts janvier. La mélancolie des vœux, la tristesse des jours qui ne rallongent pas encore vraiment. J’ai surtout pensé à toi, petite fille, à ta joie sans retenue durant de cette période où l’imagination de l’innocence est si forte, pour encore quelques fugaces années. Après, il sera bien temps que tu te rendes comptes que Noël et le gros bonhomme rouge à barbe blanche ça n’existe pas, et c’est peut-être tant mieux car on dit que c’est une sacré ordure. Ça ne m’étonne pas d’ailleurs : un type aussi gros et moche capable de rentrer sans frapper chez les gens pendant leur sommeil en ramonant la cheminée avec sa hotte à la con, pour déposer des trucs sous un sapin dans un salon et filer à l’anglaise : c’est louche, quand même.


Toi tu t’en fiche. Mais je te demande pardon, ma fille : ce matin, j’ai noyé le sapin. Je me console en revoyant l’image de ta joie à découvrir tes deux cadeaux préférés : le livre des trois petits cochons en relief et animé ; et un camion de pompiers avec une grande échelle et des boutons pour faire du bruit. Ah oui parce que j’ai oublié de vous dire : cette fille n’est peut-être pas une fille. Tu aimes les camions de pompiers et les voitures. Mais le rose est quand même ta couleur préférée. Les intégristes de la lutte contre les stéréotypes sexistes vont sûrement avoir eux aussi des choses à dire. S’ils en ont le courage, avec les ayatollahs de l’écologie, ils peuvent aller prendre un bain dans la Loire : il y a un sapin qui flotte comme un petit bouchon au bas d’un raidillon ligérien.


Et ce soir, une petite fille demandera : « il est où, le sapin ? » Je n’aurai pas la force de répondre…

 

 

celui-ci a eu moins de chance, finalement :

 

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L'étoile filante

5 Janvier 2015 , Rédigé par Fred Sabourin Publié dans #voyage - voyage..., #Lettres à ...

 

 

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Dimanche 4 janvier, 6h45 du matin. Extérieur nuit, route nationale 20, La Tour de Carol. 2° dehors. 21° à l'intérieur de la voiture. Les ombres blanches des sommets s'abattaient sur nous ; et la grande gueule d'une lune enceinte quasiment jusqu'aux yeux éclairait faiblement la route. Soudain, en direction du col de Puymorens, une étoile filante stria le ciel constellé d'étoiles.

Quel présage apportait-elle, cette enfant unique mort-née de l'atmosphère glacé ?

Je préfère amplement faire un voeux à celle-ci que tous les autres des débuts d'années, l'haleine chargée de relents de boudins blancs truffés, de chocolats fourrés et de champagnes tièdes.

Car ceux faits aux étoiles filantes ont probablement plus de chances de se réaliser... 

 

 

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                                             - Plouf ! -

 

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La cage aux folles médiatique

29 Décembre 2014 , Rédigé par Fred Sabourin Publié dans #édito

 

L’épisode hautement médiatisé – trop selon certains commentateurs et observateurs – des grilles anti-marginaux alcoolisés sur neuf bancs publics du Champs-de-Mars d’Angoulême aura au moins le mérite de faire réfléchir sur plusieurs maux que notre société dite moderne et débridée génère régulièrement. 


Le premier – et non des moindres – concerne une nouvelle fois l’extraordinaire réactivité de la courroie de transmission des réseaux sociaux. Si le phénomène a pris une telle ampleur, c’est qu’il a été très largement amplifié par Facebook et Twitter, en un temps minimum. Certes, l’information de base provenait d’un quotidien local (dont les fenêtres donnent sur les bancs incriminés), mais la caisse de résonnance est venue des réseaux, pour le meilleur comme pour le pire. Un creux dans l’actualité – un éditorialiste de la Charente-Libre parle très justement de « marée basse » - a fait le reste. A 48 heures près, en amont comme en aval, l’information serait tombée en plein dans un autre fait divers : les conducteurs fous fonçant sur les foules à Joué-les-Tours, Dijon et Nantes. En aval, l’information c'était sous les kilomètres de bouchons enneigés  des « naufragés de la route » (sic) sur la route des cols vers les stations de ski en Savoie. Les bancs grillagés auraient sûrement fait le buzz localement. Probablement pas nationalement. 


La force de frappe des réseaux sociaux a de quoi interpeller les journalistes que nous sommes. Récemment, Le Monde en a fait douloureusement l’expérience, suite à la publication le 9 décembre dernier d’un article sur Saint-Etienne, « centre-ville miné par la pauvreté ». Déluge de tweets et de messages Facebook acides, d’invectives, de mails au chef du service France, etc. Le médiateur du quotidien a même dû intervenir (édition du 20 décembre). De mémoire du Monde - qui fêtait en décembre ses 70 ans - « on n’avait jamais vu ça. » Jusqu’au déploiement d’une banderole dans les tribunes du stade Geoffroy-Guichard : « Descend dans le taudis, on va t’apprendre à refaire Le Monde. » Diantre ! Et le journaliste envoyé spécial sur place pour éteindre l’incendie de s’interroger à la fois sur la manœuvre politique autant que technologique du nouveau maire de Saint-Etienne Gaël Perdriau (UMP). Fin utilisateur très réactif des réseaux sociaux, il a appelé les Stéphanois à poster sur Twitter les plus belles photos de la ville. Et ça a marché ! 


Cependant, la fronde, la bronca, la levée de boucliers n’a pas atteint celle à l’encontre de la municipalité angoumoisine et de son jeune maire, UMP lui aussi, Xavier Bonnefont. Pour les raisons déjà évoqué d’actualité molle, mais aussi parce que l’objet même du délit avait de quoi heurter : quiconque a vu les grilles posées – en catimini – sur les bancs ne peut que déplorer le style chenil qu’il représente. Le savoureux mélange avait donc tout pour mettre le feu aux poudres : les réseaux sociaux, la proximité de Noël (les grilles ont été posées le 24 décembre, et démontées le lendemain…), l’absence du maire lui-même laissant à son adjoint à la sécurité le soin d’affronter, pas toujours très adroitement, les médias nationaux accourus par l’odeur du bon sujet de société au milieu du chocolat, à la barbe du père Noël. 


L’autre leçon est une leçon de communication. Ça n’est pas la première fois que le mobilier urbain choisi par une municipalité cherche à évincer un peu plus loin le problème des marginaux, punks à chiens et autres clochards des centres-villes. La RATP s’est même illustrée il y a quelques années en changeant les bancs pour des sièges individuels ou des barres pour éviter aux personnes de s’allonger. Que le maire d’Angoulême ait des problèmes de fréquentations et de relations entre un quartier commerçants et des marginaux, personne ne le conteste. Le sujet est ancien, il existe ailleurs, et personne ne semble pouvoir proposer  une solution aussi efficace que satisfaisante pour tout le monde. 


Mais que personne, dans son entourage, à commencer par lui-même, n’ait eu la présence d’esprit de le prendre par le bras et de lui glisser à l’oreille que « c’est peut-être une bonne idée ton truc coco, mais là, tu vois, la veille de Noël, c’est probablement pas le bon moment pour lancer cette opération », ça confine à l’étrangeté. On sait que les maires – même de villes moyennes – sont accaparés par de multiples tâches et qu’ils ne peuvent pas tout voir ni gérer. Du moins c’est ce qu’ils disent pour se défendre. Mais on sait aussi qu’ils savent très bien s’entourer de spécialistes de la communication dans des services idoines, et de chefs de cabinets dont on pourrait espérer qu’ils aient, eux, la tête suffisamment froide pour stopper un projet dont on pouvait aisément pressentir qu’il allait choquer et déclencher un buzz de tous les diables. Surtout sous les fenêtres du quotidien local ! (« si tu ne vas pas à l’information, c’est l’information qui viendra à toi »). Il y a là un dysfonctionnement dont l’équipe du maire d’Angoulême saura, c’est à espérer, tirer toutes les conséquences.  


Cette cage aux folles servira-t-elle enfin de réflexion aux dirigeants de presse et de groupes médiatiques, très occupés on le sait à pencher leurs têtes et leurs « stratégies » au dessus de tableurs excels pour sortir du marasme dans lequel leurs journaux son plongés ? Aujourd’hui, n’en déplaise, les réseaux sociaux vont plus vite que le plus rapide des quotidiens. Ne parlons pas des hebdos : sans équipe web, ils sont à la ramasse. Après qui faut-il donc courir ? Mais il y a pire : la sous-estimation du web, des applications tablettes et smartphones, la méfiance vis-à-vis des réseaux sociaux s’apparentent à une faute professionnelle. Ils devront en rendre compte à l’heure des fermetures. Cette cage aux folles pose aussi la question non seulement de la déontologie, de la hiérarchie de l’information, de sa qualité. Mais plus encore de ce que disait le regretté Jacques Chancel, décédé la veille de tout ce barnum médiatique : « Faut-il donner au  public ce qu’il a envie de voir, ou ce qu’il pourrait aimer ? » 


 C’est exigeant, c’est vrai. Peut-être pas très vendeur à court terme. Mais si nous, journalistes,  ne voulons pas perdre notre âme, c’est là qu’il faut aller. 

Sinon : dans la cage, les folles ! (et à poil, tant qu’à faire). 

 

 

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Bourlinguer

26 Décembre 2014 , Rédigé par Fred Sabourin Publié dans #voyage - voyage...

 

 

"Alors chus r'parti sur Québec-Air
Transworld Northeast Eastern Western
Pis Pan-American
Mais j'sais pu ou chus rendu"

(Robert Charlebois) 

 

 

 

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                                           - Dans la brume électrique -  

 

 

 

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D'autres boulangeries-pâtisseries sont possibles...

17 Décembre 2014 , Rédigé par Fred Sabourin Publié dans #Presse book

 

(Parfois on me demande "Pourquoi es-tu journaliste ?" Pour ce genre de rencontre/portrait/reportage-là...)

 

 

G. Guyon

 

  

Grégory Guyon, pâtissier-boulanger, est installé depuis mai 2012 rue des Trois Marchands (Blois) à la place de Feuillette. Pas toujours facile de succéder à un mastodonte de la boulangerie.
 

Sauvé par le sucre ! Grégory Guyon, formé chez les meilleurs pâtissiers orléanais, l'avoue lui-même : "Sans ce concours, c’était le redressement. On fermait" Lauréat en 2013 du concours Talents gourmands organisé par le magazine Le Bottin gourmand, Grégory Guyon, 29 ans, a vu sa notoriété exploser, et son chiffre d’affaires se redresser. Premier prix du concours, presse et radio locale, et, cerise sur ses gâteaux, TF1 le journal de Jean-Pierre Pernaut. " Le jour où ils sont venus, un samedi, on a fait cinq heures de tournage, pour deux minutes et demie de diffusion. J’ai augmenté mes ventes dès le passage au JT. Les gens venaient en disant : on vous a vu sur TF1 ! " Après ce bond lié à la diffusion du reportage chez Pernaut, la cadence est revenue plus régulière. Si son chiffre d’affaires en boulangerie n’était pas folichon, celui de la pâtisserie a doublé. " Une libération ", répète-t-il.

  

Pain chaud

  

Mais avant d’en arriver là, Grégory et Héloïse Guyon ont passé de mauvaises nuits dans le pétrin. C’est en mai 2012 qu’ils reprennent cette boulangerie appartenant à l’origine au couple Pain (ça ne s’invente pas) puis au fameux Jean-François Feuillette, qui ouvrit sa première boulangerie en 2005 rue des Trois Marchands, Le Théâtre du pain. La succession va s’avérer difficile, malgré la présence de Mickaël, l'ex boulanger de Feuillette, qui préféra alors rester sur place que de suivre son patron à Vendôme, où il ouvrait un nouveau magasin. À Blois comme ailleurs, quand un commerce change de propriétaire tout en gardant le même produit, c’est plus fort que tout : le consommateur compare. Mais pire encore : il devient de plus en plus exigeant. " Ce que les gens veulent, explique Grégory Guyon, c’est du pain chaud l’après-midi, et même toute la journée. " Difficile, pour ce jeune couple originaire d’Orléans, dont c'est la première affaire, de faire face. Un four à gaz est coûteux. Pas de pains chauds l’après-midi. La clientèle s'en va, vers d’autres boulangeries – dont Feuillette pourtant installé en périphérie de la ville. Sans imaginer que certains boulangers, pour avoir les fameux pains chauds jusqu'en soirée, réchauffent dans un four spécial les pains fabriqués… le matin.

 

Gâteau en apesanteur

 

Mais le talent fini toujours par payer. Au bord du gouffre, Grégory Guyon tente le tout pour le tout. Habitué des podiums de concours de pâtisserie – il travailla chez les meilleurs pâtissiers d’Orléans, et au restaurant de la Ferté-Saint-Aubin la Ferme de La Lande – il n’a cependant jamais atteint la première place. Il connaît, pourtant, le concours organisé chaque année par Le Bottin gourmand : Les Talents gourmands. Mais la constitution du dossier le freine. " Je n’avais pas le temps. Ce sont eux qui m’ont appelés. Ils m’ont dit : vous avez trente minutes ? Et ils ont rempli le dossier eux-mêmes en me posant les questions. " Voilà Grégory Guyon à Chartres au Grand Monarque, en présence du parrain Alain Souchon, et de quatre autres candidats. Il doit passer en dernier. Tout est prêt depuis la veille, mais il choisit de garder les deux heures dont il dispose pour fabriquer ce qui va devenir sa botte secrète : des pièces en sucre, sur lesquelles il posera son Cœur des bois, recette originale à base de produits locaux : croustillant de noisette et céréales ; marmelade de fraises des bois déglacées au vinaigre d’Orléans ; crémeux au miel ; mousse à la noisette. Miracle : le gâteau semble tenir en apesanteur à quinze centimètres de l’assiette. Souchon est séduit. Le jury est emballé. Il gagne le premier prix. La suite, vous la connaissez.

 

Un métier difficile

 

" J’ai mis mon expérience dans ce gâteau ", explique, modestement, le pâtissier d’à peine 30 ans, dont la vocation remonte à l’enfance. " Ma mère était aide familiale. Elle confectionnait beaucoup de pâtisseries avec les enfants, pour leur apprendre à manipuler des choses fines. J’ai aimé ça. " La pâtisserie vous semble complexe ? " C’est de la chimie ! Tout est pesé, la qualité de la farine est moins importante que pour le pain. En boulangerie, la fabrication du pain est beaucoup plus complexe : tout va dépendre de l’hydrométrie, de la température journalière, combien de temps et avec quelle force vous avez pétri etc. Il faut vivre le produit. " Manière de dire qu’un boulanger, quoi qu’on en dise, ne fait jamais deux jours de suite les mêmes baguettes, quand le consommateur – de plus en plus exigeant donc – souhaite lui un produit uniforme et constant, jour après jour.

 

Pour autant, le métier reste difficile : le régime des indépendants est intraitable, les lourdeurs administratives pesantes, difficile de se dégager un salaire mensuel, horaires très élastiques (il commence à 5 heures du matin, jusqu’à 18 heures et souvent plus), le quartier un peu excentré et peu fourni en places de stationnement. La litanie est celle entendue par ailleurs chez les artisans et commerçants. " Qu’on nous laisse bosser normalement avant de nous assommer avec des normes et des tracas administratifs ", souffle-t-il. Refrain connu. Demeurent la foi chevillée au corps, et l’envie d’en découdre, quitte un jour à s’expatrier – il y songe, parfois.

 

Ce serait dommage : face aux boulangers-pâtissiers de moins en moins artisans et de plus en plus industriels, Grégory Guyon fait figure d’orfèvre. Et ça, ça vaut de l’or.

 

 

F.S

 

 

article paru dans La Renaissance du Loir-et-Cher le 19/12/2014

 

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Je te crèche à la face

9 Décembre 2014 , Rédigé par Fred Sabourin Publié dans #cadrage débordement

 

 

150.000. C’est le nombre – selon l’Insee - de personnes qui vivent aujourd’hui dans la rue en France, pour 100.000 places d’accueil, au chaud, avec un lit et des draps propres. Face à la saturation nationale du 115, la Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale (Fnars) demande à l’Etat d’ouvrir sans attendre toutes les places d’accueil disponibles. Les listes d’attente s’allongent. Dans certaines villes, les gens appellent le 115 sans qu’on puisse leur proposer de solutions. « 40 % de plus qu’il y a 10 ans », selon Florent Gueguen, directeur général de la Fnars. 1,3 milliards d’euros sont pourtant engagés chaque année pour l’hébergement d’urgence… (Alors que le droit à l’hébergement est un droit reconnu par le Conseil d’État). 


Et pourtant… Ces jours-ci, la polémique tournait autour des crèches dans les lieux publics : mairie, Conseil généraux, etc. Cachez ce sein (pourtant chaste) de la Vierge que je ne saurais voir ! Dehors le Jésus faisant pipi et caca dans ses langes, sous le regard attendri des bergers, et plus tard, de ces immigrés qui se font passer pour des rois mages ! Nom de Zeus bazardez-moi tout ce folklore à la con au nom du dieu laïc, merde ! 


Tiens mais au fait, la crèche… C’est quoi encore cette histoire ? Qu’est-ce que c’est que ce truc de gueux exposé à la face des riches et des puissants ? Et ce mioche ne pouvait-il pas naître ailleurs ? Dans une maternité chauffée avec la télé et 19 chaînes en chambre individuelle comment tout le monde non ? C’est bien la peine d’avoir un père adoptif artisan-commerçant, une mère femme au foyer et un géniteur qui se fait passer pour Dieu le père si c’est pour finir sur la paille ! Non mais c’est vrai quoi, merde. 

Hein ? Comment ? Il n’avait pas de place dans la salle commune ? Ses parents s’étaient fait virer de partout et c’est pour ça qu’il est allé respirer l’air frais du dehors, en poussant son premier cri dehors justement ? Dans une mangeoire ou un creux de roche ? C’est pas vrai… Putain si c’est pas malheureux quand même… 


Alors cachez-moi cette crèche que je ne veux pas voir. Elles rappellent trop aux psycho-rigides de la laïcité qu’ils sont eux-mêmes les premiers figurants du folklore : un âne et un bœuf. Elles rappellent surtout aux riches gavés de tout et surtout d’eux-mêmes ce qu’ils ne veulent pas voir : que cette crèche symbolise les 150.000 sans abris d’aujourd’hui. Pour lesquels « il n’y a pas de solution » autre que de les faire crécher dehors. 


En leur créchant à la face. 

 

 

http://www.franceinfo.fr/actu/societe/article/accueil-des-sans-abris-la-situation-est-catastrophique-en-france-614239

 

 

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Ma cabane (mais pas au Canada) # 2

6 Décembre 2014 , Rédigé par Fred Sabourin Publié dans #montagne

 

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                                       - Ma cabane -

 

Une cabane au Canada ? Non, ma cabane d’Ossalois, dans le petit matin de novembre froid. Encore un pas puis deux puis trois, voici l’éclatante chaleur visuelle et olfactive de l’automne. Ô tonne chéri ! Comme tu me caresses dans le sens du poil de tes senteurs, de tes couleurs ! Ils entrent par tous les pores de ma peau, et je vibre à te sentir m’envelopper, alors qu’un pas puis deux puis trois, j’arrive près de celle du Long d’Ayous, où je dormis tant de fois, enveloppé d’un drap d’étoiles et de rêves d’ascensions, contemplant avant  que le marchand de sable ne passe la cime de « Jean-Pierre ».

 

SAB 1515 R

 

Alors que je n’aperçois pas encore la faîtière du refuge d’Ayous, la neige crisse déjà sous nos pas, premiers flocons tombés la veille alors qu’en bas une pluie grise et froide enveloppait toute chose. Arrivés au bord du Lac Gentau, il y avait juste assez de brise pour empêcher le reflet de « Jean-Pierre » dans le lac, souvenir d’une belle photo ici même à l’automne dernier.

 

  SAB 1526 R                                           - Etat de siège -

 

 

Qu’à cela ne tienne, et c’est vers Berseau que nous allons, où la bordée de nuages – inoffensifs – donnent à penser… Au bord du lac Castéreau la vue était à la hauteur de la journée. Le cul sur une pierre froide, le pâté à l’ail ne nous a pas empêché de contempler ce qu’il y avait à voir, risquant juste une fracture de l’œil (ça fait pas mal).

 

 

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                                          - Just have a lunch -

 

En descendant près d’autres cabanes – toujours pas au Canada – deux cadavres de vaches dévorées récemment par les vautours qui ont dû s’en donner à cœur joie… Chers vautours, désormais repus… Qu’ils se régalent les braves, des blondes d’Aquitaine aux bourbonnaises en passant par celles du Perche, qu’ils se repaissent de ces restes royaux, avant que l’hiver n’arrive et ne les mette à la diète forcée !  Les encorneuses cornues finiront cocues, avec de belles cornes… Je « contemple » ce qui reste de ces bovins, et songe à d’autres, en criant : « mort aux vaches ! »

 

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                                                       - Death valley -

 

 

SAB 1566 R

                                                             - Death valley # 2 -

 

Mais déjà le jour baisse et la fraîcheur se fait sentir : nous ne sommes plus en été malgré la douceur de vivre de cette journée extraordinaire. Il faut, encore une fois, se résoudre à redescendre et retrouver la vallée, non sans avoir fumé la cigarette de la liberté au cul de la bagnole en contemplant une dernière fois, cabanes, arbres en feu automnal, et sommet mythique sur lequel nous étions il y a à peine deux mois. Montagnes Pyrénées, décidément, vous êtes mes amours.

 

 

 SAB 1573 R

                                          - Après l'effort -

 

 

 

   F.S.  8-11 novembre 2014. Vallée d'Ossau, Béarn, France.

 

suite de Ma cabane, mais pas au Canada (teasing de ouf !)

 

 

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Une nouvelle amie

27 Novembre 2014 , Rédigé par Fred Sabourin Publié dans #chronique cinéma, #Presse book

 

 

Duris

 


François Ozon joue avec les codes – qu’il transgresse – et les genres – qu’il bouscule – dans un film où même le spectateur peut goûter au plaisir du travestissement.

 

Pendant un long moment, on se demande où François Ozon veut emmener le spectateur avec Une nouvelle amie. Le début est pourtant limpide, et c’est même un beau moment de cinéma. Claire et Laura sont deux amies inséparables depuis leur 7e année. Dans le premier quart d’heure, le réalisateur balaie au cours d’un montage virtuose les vingt premières années de la vie de ces deux jeunes filles. Découverte, adolescence, rencontre du prince charmant, mariage de tradition familiale dans une paisible église de province bourgeoise et catholique. À peine mariée à David (Romain Duris), Laura (Isild Le Besco) – qui vient d’accoucher – meurt d’une maladie laissant seuls le père et Claire (Anaïs Demoustier). Cette dernière commence à sombrer dans la dépression qui amène son mari (Raphaël Personnaz) à lui conseiller d’aller rendre visite au jeune père veuf. Lorsqu’elle arrive chez lui, Claire tombe sur David costumé en femme blonde portant les vêtements de sa défunte épouse. Il justifie cet étonnant choix en disant que cela calme le bébé, perdu sans sa mère. Et cela satisfait pour lui une ancienne pulsion de travestissement, refoulée pendant son mariage.

 

Vertige des sentiments


Si cette transgression du genre est bien le véritable point de départ d’Une nouvelle amie, elle ne sera pourtant pas l’unique dans un scénario à la fois rigoureux, plaisant et déroutant. Le dégoût et l’incompréhension initiale de Claire vont peu à peu laisser place à d’autres ambigüités faites de désirs, de vertiges, de tentations, de séductions, de plaisirs troublants, d’érotisme libéré. Romain Duris prend un malin plaisir à jouer une femme dans un travestissement finement étudié, Anaïs Demoustier n’en demeure pas moins une jeune femme liée par tradition familiale au conformisme bourgeois d’une province aisée (qui n’a parfois rien à envier aux lotissements résidentiels américains), mais sérieusement ébranlée dans ses certitudes. Il n’est pourtant pas question ici du combat social que pourrait mener « David – Virginia » (le prénom choisi lorsqu’il s’incarne en femme), tel que François Ozon aurait pu le monter, avec toute la violence que cela supposerait. Pas non plus une sorte de comédie Cage aux folles. La question est moins « qu’est-ce que se découvrir travesti quand on vient d’un milieu hétéro bourgeois où cette transgression est tout bonnement inaudible ? » mais plutôt : « qu’étaient donc réellement les relations entre ces deux jeunes femmes, amies depuis si longtemps, et dont l’absence de l’une remet profondément en cause les sentiments de l’autre ? »


« Je suis une femme »


François Ozon, auteur du récent Jeune et jolie, joue avec les ambigüités et la transgression des codes à une époque où la société est extrêmement clivée sur les questions de mariage pour tous, de supposée théorie genre, des désirs refoulés qui finissent souvent par éclater au grand jour. D’autant plus violemment qu’ils étaient bien cadenassés dans le conformisme. Si le casting est parfait, n’en demeure pas moins une petite frustration à la sortie d’Une nouvelle amie. Celle d’avoir certes assisté à un bon film qui tient le spectateur jusqu’au bout, mais en laissant ouvertes beaucoup de portes qu’il aurait été intéressant de traverser. Comme pour La prochaine fois, je viserai le cœur de Cédric Anger dont nous parlions ici récemment, on aurait aimé qu’Ozon ose tirer des ficelles chabroliennes pour aller au-delà du désir, justement. Car ce qui est suggéré à l’issue d’Une nouvelle amie donne envie de savoir ce qui a bien pu se passer dans l’ellipse finale résumée par un « 7 ans plus tard ». On devra pour l’heure se contenter d’une des dernières paroles du film : « Je suis une femme ! » envoyée de Virginia à Claire par texto.


Certes, mais…
 

 

F.S


Une nouvelle amie, de François Ozon. Avec Romain Duris, Anaïs Demoustier, Raphaël Personnaz, Isild Le Besco. 1h47.



Virginia

 

 

 

Une nouvelle amie

 

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La prochaine fois je viserai le cœur

13 Novembre 2014 , Rédigé par Fred Sabourin Publié dans #chronique cinéma, #Presse book

 

Canet 2 

 

 

Le nouveau film de Cédric Anger met en scène l’histoire d’un fait divers de la fin des années 70 : un gendarme tueur de jeunes filles. Noir, sobre, et nerveux.

 

Dans l’appartement de Franck, gendarme de son état, une affiche de David Hamilton attire l’œil et pas seulement. On connaît le goût, parfois sulfureux, du célèbre photographe et réalisateur londonien pour les jeunes femmes encore en fleur, à peine sortie de l’adolescence. La clé de la personnalité complexe, double, maladroite, peuplée d’un imaginaire viril, fascinée par l’ordre et la morale, du gendarme Franck (Guillaume Canet) réside là. Mais n’attendez pas de La prochaine fois je viserai le cœur qu’il vous la donne tout cuit.

 

Le « tueur de l’Oise »

 

L’histoire est inspirée de faits réels : en 1978-79, dans l’Oise, une série de meurtres et de tentatives de meurtres défraie la chronique. Plusieurs jeunes femmes sont en effet retrouvées mortes ou sérieusement blessées, soit renversées par une voiture alors qu’elles circulaient à mobylette, soit parce qu’elles faisaient de l’auto-stop. L’enquête sera d’autant plus longue que le coupable – qui finira par être arrêté – est un gendarme de la brigade chargée, avec la police judiciaire, de l’enquête. La prochaine fois je viserai le cœur est une formule utilisée par le gendarme-tueur dans des lettres anonymes qu’il envoyait afin d’essayer d’expliquer ses actes autant que pour brouiller les pistes. On l’appellera même « le tueur de l’Oise ».

Cédric Anger, fasciné par les films noirs, signe avec La prochaine fois je viserai le cœur une œuvre forte, dans la lignée de celles d’un Jean-Pierre Melville (on pense au Cercle rouge), ou Alain Corneau (Série noire). Déjà l’auteur du Tueur (en 2007) et de L’avocat (2011), Cédric Anger maîtrise les codes du film de genre. Mais ne croyez pas qu’il s’agisse d’une série B : La prochaine fois je viserai le cœur possède la classe et l’ambiance des meilleurs polars, pour plusieurs raisons.

 

Traque, suspicion, désillusion

 

D’abord et avant tout pour le personnage lui-même. Repoussant autant que fascinant, la personnalité de ce gendarme-tueur, Franck (1) ne peut laisser indifférent le spectateur. L’audace de Cédric Anger et de donner le point de vue du criminel au point de le rendre attachant. C’était risqué, mais ça fonctionne, surtout par le choix de Guillaume Canet pour interpréter le rôle. Mâchoires serrées, adepte de l’automutilation, incapable de nouer une relation avec une jeune femme qui pourtant lui saute au cou, troublé même par l’ambivalence sexuelle lorsqu’il doit se rendre sur des lieux de dragues homosexuels pour les besoins de l’enquête. Un rôle parfaitement interprété, de solitaire discret apparemment rangé, rêvant d’une mutation dans une unité type GIGN par envie de voyages, apprécié par son supérieur, dont il a la confiance. Ambivalent jusqu’au bout de lui-même, son besoin d’exister passe aussi par ses crimes, qu’il commet dans un état de folie ne parvenant pas à faire oublier l’abject du geste, jusqu’à en vomir. Franck sort de chez lui, de nuit. Puis traque une proie comme un chasseur, et la tue, ou la blesse mortellement. Puis il rentre chez lui s’allonger sur un lit impeccablement fait, ou dans une des pièces de l’appartement aménagée en repère de guerrier, véritable forteresse militaro-criminelle, avec articles de presse le concernant collés au mur.

 

L’autre raison de la réussite indéniable de La prochaine fois je viserai le cœur, c’est son climat. Scènes nocturnes, froides, et journées dans le brouillard ou la pluie, omniprésence de la boue et des flaques, d’arbres sans feuilles : il ne fait pas bon vivre dans cette Oise déprimante, grise, au cœur d’un hiver triste et morne.

 

Enfin, à la manière d’un Claude Chabrol qui se serait régalé à disséquer une institution de l’intérieur, comme ces vers de terre que Cédric Anger nous montre parfois en gros plan, l’unité de gendarmerie où Franck semble un modèle, devient le théâtre peu à peu d’une traque qui glissera vers la suspicion, et la désillusion. A ce sujet, la scène finale demeure un morceau d’anthologie du film noir : confondu par ses empreintes, Franck est arrêté par ses collègues, qui, l’ayant attaché comme un vulgaire prévenu au radiateur, le fixent d’un regard dégoûté de s’être fait si longtemps berné par le meilleur d’entre eux.

 

« Attention, je vais vous faire mal », dit étrangement à ses victimes ce gendarme avant de commettre ses crimes. La prochaine fois je viserai le cœur ajoute-t-il dans ses lettres anonymes. Et l’on se dit, en sortant de la séance, que Cédric Anger et Guillaume Canet ont réussi les deux.

 

F.S

 

(1) Il s’appelait Alain Lamare, était apprécié de ses supérieurs. Il a été déclaré par les psychiatres non responsable de ses actes pour état de démence, et a été interné dans une unité psychiatrique. 

 

 

 

Canet

 

 

 

Canet 3

 

 

Photos : Th. Hardmeier. Sunrise Films. Les Productions du Trésor. Mars Films. Caneo Films.

 

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Ma cabane, mais pas au Canada

13 Novembre 2014 , Rédigé par Fred Sabourin Publié dans #montagne

 

SAB 1488 R

 

 

Ici, bientôt, il sera question de cabane (mais pas au Canada), de couleurs automnales chatoyantes, de première neige étincellante (comme du "sucre glace" ?), des frimats de l'automne d'une journée inoubliable, d'un bon feu de cheminée et de vaches mortes sous le regard d'un géant.

Comme ça, vous reviendrez ici lire et en prendre plein les yeux. Et d'ailleurs ça commence là :

 

 

SAB 1526 R

 

et là aussi :

 

 

SAB 1535 R

 

Mais ça n'est qu'un début. Et si vous n'aimez pas la montagne et ses paysages, allez vous faire cuire un oeuf. 

 

(teasing de ouf ! )


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