faire part de naissance
Je te salue, Marie…
… comblée de grâce. Tu es femme entre toutes les femmes, et le fruit de tes entrailles est béni, puisqu’il est fils. Le tien, et celui de Dieu.
Toi, mère de celui qui porte tout, merci de l’avoir nourri de ton sein, jusqu’à nous.
Montre-lui combien nous l’aimons, et combien, grâce à lui, les vivants s’aiment entre eux. Se cherchent, et parfois se trouvent.
Maintenant, et à toute heure de la vie. Jusqu’à la fin, qui sera comme un début.
Au coeur des ténèbres, il y a la lumière. Celui qui l’aperçoit sera sauvé.
des visages, des figures : rencontres
perplexe…
Vous allez dire que les anges, décidément, me laissent perplexe. Il y a eu celui de Toulouse, un beau jour d’été, du côté de la place de la Daurade. Ceux d’un soir pianotant un air de jazz qui font vibrer le cœur des grands. Puis celui du train St Lazare – Versailles, rive droite, fou prophétique. Il y a maintenant ceux de Fourvière, et de la rue Monge, ou des brasseries à l’heure du déjeuner. Des endroits insolites autant qu’inattendus, des visages, des figures, des rencontres provoquées ou au hasard d’un coup de téléphone. Au détour d’une rue, d’une place, d’un monument.
Celui de Fourvière, sur la colline de Lyon, précède le lion du désert des soirs tombant. Derrière son dos, il trône, de ses ailes déployées, le doigt sur la bouche, semblant retenir un secret au delà de l’audible. Cet ange statufié est tout simplement… perplexe. La foi en points de suspension. Reflet de l’humain qui s’interroge, avance plutôt que de reculer, interpellant le passant dans sa pérégrination au devant de la réalité.
A l’entrée de la basilique, il m’accorde le droit et la liberté de dire à ceux qui se posent des questions : laissez la perplexité exercer son pouvoir de libération. Le désir d’aimer et de rencontrer ceux et celles qui sont sur son passage. Là, maintenant. En attente d’un ailleurs qui se fait toujours espérer. Mais qui approche, imperceptiblement, sûrement aussi.
La rencontre de l’être cher se fait attendre. Il n’est pas loin pourtant. Patiemment elle se rapproche, lorsque la reconstruction se fait plus sûre.
Au delà de la perplexité, la vertu principale de l’ange, et de l’homme, c’est la patience. Elle a commencée sur le continent indien, à l’orient de l’automne. Traversant l’hiver, elle sortira, très probablement, de la longue saison qui commence. Le printemps sera beau, car il aura la couleur de la lumière.
Le doigt sur la bouche, avant que lui même ne désigne l’amour qu’il attend, le cœur au chaud, prêt à tout. Sans être perplexe, mais avec assurance. Et libre.
(pour Bruno, Claire-Anne, Henriette, Jean-Guilleme, Loïc, Aurélie, Arnaud, Jeanne, Didier, Marc, Marie, Benoît, Emilie, Thierry, Laetitia, Jean-Marc, Thibault, Olivier, Bénédicte, Cécile, Hugues, Vanessa, Didier, Sophie, Lionel, Anne-Laure, Xavier, Claire, Paul, Laurence, Isabelle, Michel, Claire…)
ralentir : école !
C'est beau une ville le soir... Le coeur en hiver. Quand le bleu laisse la place à la brume, pour que s'illumine, enfin, les planètes suspendues au couteau du boucher... Les enfants peuvent goûter de tartines au chocolat, et courir vers le week-end. Il règne une sorte de fièvre de début de shabbat... Le Malka des lions pourra bientôt distiller la sagesse, à ceux qui la souhaiteront. Même l'ange est perplexe : le doigt sur la bouche empêche le serment de se dire. Il est donc à vivre...
Rien d'autre à dire, sinon que l'oeil peut fonctionner quand les pieds, quelques encablures plus bas, le porte là où personne ne voit. (rien d'autre à dire... pour l'instant ! car la plume va bientôt se faire prolongement de l'oeil...) à suivre...
fidélité montagnarde
béatitudes, les pieds dans la neige de l’Ossau
Heureux les contemplatifs : ils verront souvent de belles choses que d’autres ne verront jamais.
Heureux ceux aiment combattre : la vie est là pour leur fournir des occasions de le faire.
Heureux ceux qui aiment marcher, la terre est grande, belle et ronde : ils n’ont pas fini d’en faire le tour.
Heureux ceux qui aiment la mer : elle noie les secrets inaudibles, et les transforme en pluie.
Heureux ceux qui aiment la montagne : sur les sommets, il n’y a pas d’encombrements.
Heureux ceux qui savent se mettre en danger : ils prennent des risques inconsidérés, mais ça peut donner du fruit.
Heureux ceux qui savent aimer jusqu’au bout d’eux mêmes : ils ne savent pas encore s’ils seront récompensés, mais ça prouve qu'ils sont vivants.
Heureux ceux qui pleurent à cause de l’amour : ils peuvent toucher le fond, et d’autres cœurs.
Heureux ceux qui savent perdre du temps : ils sauront rester jeunes.
Heureux ceux qui savent prendre du temps : ils connaissent la joie et l’excitation des joueurs.
Heureux ceux qui savent être patients : ils ont raison.
Heureux êtes vous si vous recherchez la paix : c’est le meilleur moyen de la retrouver.
Heureux êtes vous si vous êtes libre : ça coûte cher, mais c’est le meilleur moyen de trouver le bonheur.
(Marc et Bénédicte dans la montée vers les lacs d'Ayous, dans les Pyrénées du haut Ossau, le 2 décembre. Un autre Austerlitz...)
(l'Ossau ne lèvera pas plus le voile... Pudique ou impressionné par ses fidèles marcheurs ?)
(la redescente dans la vallée est toujours une petite mort en soi. Le chant du torrent indique en réalité une renaissance... On peut y boire, l'eau n'est jamais la même)
j'étais un grand bateau descendant la Garonne...
un pont, entre deux rives
La vie des hommes est parfois faite de ruptures plus ou moins brèves, plus ou moins douloureuses. Entre eux s’instaurent une distance, des silences, qui ressemblent à ces fleuves. Tant qu’il y a un pont, les deux communiquent avec une facilité déconcertante. On y fait même plus attention. C’est aussi pour ça qu’on a construit des ponts : pour qu’on les oublie. Eloignés et puis soudain si proches. Traversés en tous sens. En dessous, coulent la Garonne, la Seine ou tout autre cordon ombilical qui permet de s’y admirer, de voyager, d’y noyer sa douleur : le fleuve absorbe tout, du murmure d’amour au cri déchirant des regrets.
La vie des hommes ressemble à ces histoires de ponts. Chacun sur sa rive, ils cherchent à se rejoindre. On imagine pas à quel point, parfois, cela peut être compliqué. Alors qu’il suffit de passer le pont. Entre deux rives.
« L’autre rive ! Avant tout, on doit apprendre à oublier qu’il existe une autre rive. Car la rive est toujours là quand c’est nécessaire. De même que, dans le rêve, le moyen d’éviter l’anéantissement, c’est de se réveiller, dans un voyage sous-marin, le rivage est toujours là à propos, dès qu’on a décidé de s’en sortir. La folie ne survient que lorsqu’on n’est pas certain d’en être capable. La mort qui nous attend tous est l’amnésie qui afflige inévitablement le rêveur qui refuse de se réveiller au moment crucial. Des générations entières d’hommes ont ainsi trépassé dans leur sommeil, si bien que la mort est devenue une habitude. C’est arrivé à ceux qui se sont embarqués pour un long voyage – je veux dire ceux qui ont voulu parvenir à la frontière d’une autre réalité – lorsque à un moment donné ils ont brusquement perdu la foi, et par la même occasion le contact avec toute réalité, la plus évanescente fût-elle ».
Henry Miller, ("le pont de Brooklyn") dans : L’œil qui voyage (1939)