Villandry, c'est joli
Châteaux de la Loire
Le long du coteau courbe et des nobles vallées
Les châteaux sont semés comme des reposoirs,
Et dans la majesté des matins et des soirs
La Loire et ses vassaux s'en vont par ces allées.
Cent vingt châteaux lui font une suite courtoise,
Plus nombreux, plus nerveux, plus fins que des palais.
Ils ont nom Valençay, Saint-Aignan et Langeais,
Chenonceau et Chambord, Azay, le Lude, Amboise.
Et moi j'en connais un dans les châteaux de Loire
Qui s'élève plus haut que le château de Blois,
Plus haut que la terrasse où les derniers Valois
Regardaient le soleil se coucher dans sa gloire.
La moulure est plus fine et l'arceau plus léger.
La dentelle de pierre est plus dure et plus grave.
La décence et l'honneur et la mort qui s'y grave
Ont inscrit leur histoire au coeur de ce verger.
Et c'est le souvenir qu'a laissé sur ces bords
Une enfant qui menait son cheval vers le fleuve.
Son âme était récente et sa cotte était neuve.
Innocente elle allait vers le plus grand des sorts.
Car celle qui venait du pays tourangeau,
C'était la même enfant qui quelques jours plus tard,
Gouvernant d'un seul mot le rustre et le soudard,
Descendait devers Meung ou montait vers Jargeau.
Charles Péguy
(c) Fred Sabourin. 27 juin 2015.
Fête de la musique, faites du bruit
Chère fête de la musique. J’avoue, au début de ta vie, je t’ai beaucoup aimée. Jusqu’au bout de la nuit – la plus longue de l’année – parfois j’ai couru tes nombreux concerts improvisés, tes reprises plus ou moins réussies de Stairway to heaven ou de La Bombe humaine. J’ai parfois vibré d’émotion en entendant des concerts classiques qui n’avaient rien à envier à un orchestre philarmonique. J’ai dansé aussi, avec de parfaites inconnues – qui ne le sont pas toujours restées longtemps – sur des rocks endiablés gueulés par des papis répétant dans leur garage le restant de l’année, et visiblement heureux de prendre l’air. Mais aujourd’hui, après plus de 30 ans d’existence, je dois te l’avouer : je divorce.
Ça faisait quelques années que je ne te fréquentais plus que du bout des oreilles et des orteils, le solstice d’été revenu. Parfois la météo m’a bien aidé à rester chez moi, le 21 juin prenant souvent hélas des allures de 21 novembre. Cette année, j’étais bien décidé à retenter le coup, pour voir si, par hasard, tu avais un peu changé, pour le moins évolué. Je n’ai pas été déçu, mais en pire. Chère fête de la musique, dans un centre ville de ville moyenne, lascive bourgeoise endormie sur les bords d’un fleuve réputé sauvage, tu n’es que cacophonie criarde et gueularde, chevauchement de cris et de riffs saturés. De fausses notes à peine assumées, d’œuvres magistrales d’artistes légendaires massacrées par des apprentis musiciens qui sont sortis trop tôt du garage, ou qui ont du manquer quelques répétitions. Mais cela, encore, je peux le pardonner : on ne devient pas musicien en claquant des doigts, alors qu’on peut apprécier le rythme simplement en tapant du pied. J’ai plus de mal à comprendre les « groupes » qui s’installent si près les uns des autres, et dont le gloubi-boulga écrase celui du voisin juste parce que son ampli est réglé plus fort. Et je ne parle pas des « balances » qui permettent de n’entendre que les batteries et quelques lignes de basse, donnant un spectacle assez croquignole de chanteurs sur scène aphones, malgré leurs efforts visibles d’hurler I can get no satisfaction.
Mais le pire, chère fête de la musique, est au-delà du bruit : c’est ton odeur qui me met le plus mal à l’aise. Je dois bien te l’avouer même si la politesse élémentaire et la bonne éducation devraient plutôt me laisser silencieux : tu sens l’alcool des bières tièdes et collantes, et la pisse froide le long des murs (conséquence des précédentes). Passe encore sur la transpiration de mes contemporains qui n’ont pas du voir un morceau de savon depuis Pentecôte, mais ton haleine fétide de bière et tes traces d’urine dans les caniveaux de la ville, j’avoue, j’ai du mal. Et comme un malheur ne vient jamais seul, cette soirée là, la plus longue de l’année, est une des trois où le tapage nocturne n’est pas considéré comme un délit (avec le 14 Juillet et la Saint-Sylvestre), aussi les ivrognes de tout le pays peuvent s’en donner à cœur joie jusqu’aux premières lueurs de l’aube, et pisser sans vergogne sur tous les réverbères de la ville. Là, à la bière tiède et l’urine froide, peuvent s’ajouter les effluves de vomit, que ceux qui rendent au travail tôt le matin en parcourant les rues fumantes des bacchanales de la veille, doivent éviter, slalomant tel des skieurs urbains, reconnaissant ici un reste de pizza aux quatre fromages mal digérée, là une carbonara trop lourde à porter, plus loin un kébab défraîchi avec ses frites molles et sa sauce barbecue.
Je ne nie pas qu’il puisse exister, dans certains recoins de la cité (conservatoire, cour du Château royal, préfecture) des havres de paix où l’on joue « de la musique » en essayant de respecter ceux qui l’ont écrit - et qui bien souvent sont fertilisent les chrysanthèmes depuis fort longtemps - mais aussi ceux qui l’écoutent. Ces bulles d’air presque pur sont si rares, et il faut traverser tant de champs de mines auditifs et olfactifs pour les atteindre qu’on se demande si cela vaut la peine. Rien que pour encourager le bel ouvrage et finir sur une note (de musique) positive, répondons : oui !
Mais pour le reste, chère fête de la musique, je te le dis, ma reprise préférée qu’il me plairait d’ouïr est une chanson bien connue du groupe Téléphone : Je rêvais d’un autre monde…
Je t’embrasse, à l’année prochaine, peut-être. Pas sûr. On verra s’il fait beau.
En MMA, Julien Piednoir assure
Le champion blésois originaire de Vierzon ouvre à Blois une salle de Mixed martial arts, la Top Team Academy. Brutes épaisses, passez votre chemin.
Si pour vous " MMA " n'est que l'acronyme d'un géant mutualiste avec " zéro traca ni blabla ", alors vous avez un train de retard. Le MMA, Mixed martial arts, est un sport de combat et de contact venu des États-Unis, dans les années 80-90. On appelait ça le freefight et vous avez peut-être vu Fight club, film de David Fincher avec Brad Pitt, en 1999. Les combats, organisés par son principal promoteur américain UFC (Ultimate Fighting Championship) étaient très spectaculaires et surtout… sans règles ni limites. Tout, mais alors vraiment tout était permis : coups de pieds, coups de tête, coups de poings, frappes au sol, et – châtaignes sur le gâteau si on ose le dire ainsi – des " penaltys à la tête ", comprendre des coups de pieds dans la tête quand l'un des combattants est au sol. Dis de la sorte, ça ne fait pas forcément envie…
Mais ça, c'est terminé, le MMA est passé par là. Depuis le début des années 2000, il s'est grandement règlementé, à défaut de s'être adouci. Julien Piednoir, champion de cette discipline, originaire de Vierzon mais vivant à Blois depuis 3 ans avec sa femme et leur petit garçon de 20 mois, ouvre la " Top Team Academy ", rue Jean-Moulin.
Des entraînements très variés
Ce solide gaillard de 27 ans et 87 kg tout en muscles – il descend à 77 kg avant un combat – est un ancien rugbyman, parti à 19 ans pour Montpellier. Là bas, il découvre les sports de combat, dont le MMA. Il s'entraîne dur, très dur, et gravit les catégories : D, C, B, puis A, la catégorie reine, celle des compétitions internationales, avec juste une paire de gants, une coquille protège parties génitales et un protège dents. Depuis qu'il est passé professionnel, Julien compte six victoires et une défaite. Son prochain combat est le 20 juin au Portugal, à Porto. Mais alors pourquoi ouvrir une salle de MMA à Blois, quand on connaît la réputation sulfureuse de ce sport dont les combats officiels sont interdits en France ? (lire par ailleurs) " J'ai envie d'apporter mon expérience à d'autres. J'ai 27 ans, il est temps pour moi de déjà penser à la reconversion. Et puis j'aime bien apprendre. Le MMA marche bien en France car c'est un sport très complet, ludique, il intéresse tout le monde. Les gens y cherchent une forme de challenge, malgré la dureté des entraînements ", dit-il franchement. C'est sans doute pour cette raison-là qu'il éloigne le public qu'on croirait pourtant friand de " baston " et de " coups dans la gueule ". Vous imaginiez les jeunes de banlieues à grandes gueules venir suer sur les tapis du MMA ? Erreur : beaucoup trop dur, beaucoup trop fort, la discipline y est féroce, une hygiène de vie saine est hautement recommandée. Et surtout, plus que tout : le MMA est bardé de règles, pour éviter d'y faire n'importe quoi, et sortir de cette réputation de combats de gladiateurs. " Une centaine ", ajoute Julien. " Les arbitres sont présents et très pros. C'est très encadré, il ne faut pas croire qu'on peut tout se permettre. " Toujours utile de le dire, car les vidéos qui traînent sur Internet montrent une réalité – ancienne visiblement – bien différente. " Les entraînements sont très variés, il n'y en a jamais deux pareil. Il y a une recherche d'adrénaline. Oui, c'est vrai, c'est un sport dur. Mais je souhaite encadrer les choses. Ici, on sera ponctuel, on range ses affaires, je ne veux pas voir de trucs qui traînent, les vestiaires doivent être propres et rangés. " On est prévenu : ce n'est pas l'armée, mais si on veut que tout le monde s'y retrouve dans une bonne ambiance, il faut mettre tous les adhérents au diapason. " L'équipement des combattants sera intégral : plastron, protège-tibias, protège-dents, casque, gants épais, coquille. " C'est lui, avec son œil d'expert (1), qui déterminera qui accèdera à des combats plus ou moins difficiles.
Faire émerger des talents
Le MMA, un sport de bourrins agressifs ? " Pas du tout, contrairement à ce qu'on croit ", ajoute encore Julien Piednoir. " Ça ne sert strictement à rien. Il faut avoir envie plus que de l'agressivité. Tout se joue dans les enchaînements. Il faut être lucide, cool, souple, et précis. Il y a aussi un grand respect de l'adversaire, comme en boxe par exemple. L'animosité est dans la cage, ou sur le ring. Avant un combat, c'est vrai on ne se parle pas, on ne sourit pas. Ça fait partie du jeu. Mais après, perdant ou gagnant, on est amis. " La cage ? Sans doute ce qui rebute le plus les spectateurs non avertis de ce sport de combat pas vraiment comme les autres. On a l'impression d'y voir des gladiateurs modernes. Elle a pourtant son utilité cette cage : " Elle sert surtout à éviter que les combattants soient projetés en dehors du ring comme cela arrive parfois dans des combats de boxe d'ailleurs ! "
Julien Piednoir ouvre les portes de sa Top Team Academy tout le mois de juin – sauf du 18 au 24 où il sera à Porto – et ne souhaite qu'une chose : faire émerger des talents, ici, dans le Blaisois.
(1) Et son BMF, Brevet de moniteur fédéral.
F.S
Le MMA se porte comme un charme
Le succès planétaire du MMA fait des envieux : en France, la Fédération de Judo a déclaré, dans un communiqué datant de novembre 2014, que "tout judoka classé dans le ranking list (classement mondial des judokas sur le même modèle que l'ATP) n'est pas autorisé à s'engager dans une compétition internationale autre que le judo". Fermez le ban. Il faut savoir que les relations entre le judo et le MMA sont plus que tendues, depuis longtemps. Depuis l'arrivée du MMA en France en fait. Face au succès de ce sport de combat spectaculaire - et pourtant très encadré presque autant aujourd'hui que le judo - la Fédération de judo souhaite se prémunir contre l’hémorragie de ses adhérents vers le MMA, ou que des judokas s'engagent dans plusieurs disciplines.
Jusqu'ici, seuls trois pays au monde et l’État de New York interdisaient sur leur sol les compétitions de MMA : la France, la Norvège et la Thaïlande. Cette dernière vient de plier, estimant que la concurrence avec une discipline locale, le muay-thaï, n'empêchait pas l'organisation de compétitions sur son sol. Aux États-Unis, les combats de MMA atteignent des records d'audience et de spectateurs, mais l’État de New York ne souhaite pas une concurrence aux combats de boxe organisés au Madison Square Garden. Mais dans le reste du pays, le MMA cartonne.
Cent vingt-neuf pays retransmettent les combats à la télévision, touchant environ 880 millions de téléspectateurs. L'UFC (Ultimate Fighting Championship, qui regroupe plus de 500 combattants professionnels de par le monde) empocherait grâce à ces retransmissions environ 2,5 milliards de dollars.
En France, difficile d'estimer très précisément le nombre d'adhérents faute de statistiques officielles. Cependant, Dragon bleu (leader de la vente d'équipements pour le MMA, crée en 2004 et qui génère la coquette somme de 15 M d'€ de CA et 45 salariés) estime à 700 clubs pour environ 30.000 membres dans l'Hexagone. Et les adeptes se comptent en milliers supplémentaires chaque année. À titre de comparaison, la Fédération française de Judo affichait en 2014 593.427 licenciés, en baisse par rapport aux années fastes du début des années 2000, avec 635.000 licenciés. 80 % des judokas ont moins de 12 ans, ce qui fait dire à certains observateurs qu'il sert surtout de garderie (on peut commencer le judo à 4 ans). Mais une chose est sûre : année après année, le MMA grignote des adhérents à d'autres sports de combat - dont le judo - qui cherchent la parade. Le combat risque d'être long et dur. Et là, tous les coups semblent permis.