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Le jour. D'après fred sabourin

À Villandry, les Rouillac ne nous ont pas laissé de marbre

9 Juin 2025 , Rédigé par F.S Publié dans #l'évènement

Dimanche 8 juin, dans l’orangerie du château de Villandry (Indre-et-Loire), la 37e vente Garden-party de la maison Rouillac a tenu ses promesses : « le Désespoir », un marbre de Rodin, a fait le bonheur des commissaires-priseurs tourangeaux et d’un acheteur américain. Il a été adjugé à 860.000 €.

À Villandry, les Rouillac ne nous ont pas laissé de marbre
À Villandry, les Rouillac ne nous ont pas laissé de marbre
À Villandry, les Rouillac ne nous ont pas laissé de marbre
À Villandry, les Rouillac ne nous ont pas laissé de marbre
À Villandry, les Rouillac ne nous ont pas laissé de marbre
À Villandry, les Rouillac ne nous ont pas laissé de marbre

Assister à une vente aux enchères Rouillac, c’est la certitude de passer une bonne journée. Le mieux est encore d’arriver la veille, afin de profiter de l’écrin dans lequel elle se déroule – cette année, l’orangerie du château de Villandry – et de la relative quiétude de l’exposition des objets qui seront vendus le lendemain.

À Villandry, les Rouillac ne nous ont pas laissé de marbre
À Villandry, les Rouillac ne nous ont pas laissé de marbre
À Villandry, les Rouillac ne nous ont pas laissé de marbre
À Villandry, les Rouillac ne nous ont pas laissé de marbre
À Villandry, les Rouillac ne nous ont pas laissé de marbre
À Villandry, les Rouillac ne nous ont pas laissé de marbre

Après avoir traversé une cour pavée (de bonnes intentions ?), fait crisser les graviers sous ses pieds le long d’un petit canal, et grimpé une volée de marches en pierres faisant face au donjon médiéval, il faut passer sous une treille tressant ses lianes et enfin contourner des buis impeccablement taillés : vous y êtes presque. L’orangerie de Villandry, orientée plein sud, s’ouvre à vous, gardée par deux hallebardiers d’Édouard Houssin de 2,2 mètres de haut (adjugés 10.000 €). Mais c’est « La petite châtelaine », un bronze de Camille Claudel (1892) qui, de son regard implorant, vous saisit, littéralement, une fois passé le seuil. La lumière du dehors baigne doucement ce visage dont l’écrivain Christian Bobin disait d’elle « qu’à lui seul il recueille ce que l’enfance  a de plus délicat. On lit sur son visage une innocence qui pressent qu’elle sera trahie et rassemble ses forces avant de recevoir le coup fatal ». Fonte posthume à la cire perdue par le fondeur Chapon, offerte par Paul Claudel à sa cousine, la petite châtelaine, appelée aussi « Jeanne enfant », « buste de fillette » ou « l’inspirée ». Elle doit son nom original au château de l’Islette où Camille cacha une grossesse non aboutie de Rodin. Elle s’attacha à la petite-fille de Madame de Courcelles (Marguerite Boyer) qui recevaient dans son château le couple, Rodin ayant trouvé un modèle pour son « Balzac ». On dénombre une dizaine de plâtres exécutés par Camille Claudel ; ce bronze porte le n°1/8.

Il fallait bien le regarder, ce visage d’une enfant soucieuse, en faire le tour plusieurs fois pour admirer aussi sa natte, admirer son profil et se laisser conter son histoire. Une visiteuse y a vu aussi le regard de l’implorante, autre œuvre majeure de Camille Claudel. Il fallait bien la regarder en effet, car elle s’envolera dans quelques jours pour le Brésil, où un acheteur (une acheteuse ?) l’a acquise pour 84.000 €… Osons le dire, nous en avons rêvé la nuit précédant la vente, elle nous a émue. Elle continuera de visiter nos rêves, bien longtemps après le dernier coup de marteau d’Aymeric Rouillac.

À Villandry, les Rouillac ne nous ont pas laissé de marbre
À Villandry, les Rouillac ne nous ont pas laissé de marbre
À Villandry, les Rouillac ne nous ont pas laissé de marbre
À Villandry, les Rouillac ne nous ont pas laissé de marbre
À Villandry, les Rouillac ne nous ont pas laissé de marbre
À Villandry, les Rouillac ne nous ont pas laissé de marbre
À Villandry, les Rouillac ne nous ont pas laissé de marbre
À Villandry, les Rouillac ne nous ont pas laissé de marbre

Le « Désespoir » de Rodin fait le bonheur des Rouillac

Et pas seulement ! La famille qui possédait ce marbre signé Rodin croyait à une copie sans grande valeur, et trônait simplement sur un piano droit, dans leur propriété des environs de Vierzon, dans le Cher. Cette famille bien inspirée aura sûrement suivi avec grand intérêt la vente du dimanche 8 juin après-midi. Il y avait foule aussi, aux entrées de l’orangerie du château de Villandry. Curieux, acheteurs potentiels, télévisions et médias locaux : le marbre attirait tous les regards. Il a été exécuté entre 1892 et 1893, il s’agit d’une figure féminine issue de la fameuse « Porte de l’Enfer », commande effectuée à Rodin par la direction des Beaux-arts en 1880 pour la création du musée des arts décoratifs, qui ne verra jamais le jour. Rare marbre de Rodin vendu aux enchères, Aymeric Rouillac précisera qu’il n’est que le dixième mis en vente sur le marché de l’art depuis les dix dernières années. Pour 860.000 € (un peu plus d’un million d’euros avec les frais…), cette petite sculpture (28,5 cm x 15 cm x 25 cm) s’envolera elle pour les États-Unis, chez un collectionneur privé.

Le parfum des roses de Villandry, attisé par un léger souffle de Pentecôte à quelques hectomètres de la confluence du Cher et de la Loire, parvenait discrètement jusqu’aux narines des spectateurs des enchères Rouillac, qui ont tenu toutes leurs promesses : on a retenu son souffle, on a applaudi, on a souri, on a ri aussi. Nous étions en famille... Quelques philosophes en bronze plus tard (Rome, époque du Bernin, 150.000 €), un tableau de Maurice Utrillo représentant la flèche de Notre-Dame de Paris vue de son chevet (20.000 €), les bords de la Garonne à Toulouse par Henri Martin (qui retourneront dans la ville rose, au musée des Augustins pour 38.000 €), ou encore le port du Havre avant la régate (1884, acquis pour 16.000 € par le Cercle nautique du Havre)… Il était temps pour nous de retrouver la réalité, après ces deux jours de rêve dans ce si beau et si riche Val-de-Loire, que des commissaires-priseurs, hors des sentiers battus, animent avec tant de brio, à coups de marteau bien inspirés.

À Villandry : Frédéric Sabourin

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