le regard qui tue :
15 Octobre 2006 , Rédigé par Fred Sabourin Publié dans #émerveillement
Une Pachtoune
La première fois, j’avais cru rêver. Ca c’était passé très vite, à un carrefour très animé près d’un grand centre commercial de Bombay nord. Le rickshaw tentait de faire demi tour. Elle attendait pour traverser. Son regard, transparent, m’avait cloué sur place. Le temps de sortir l’appareil photo du sac, elle avait disparue, et nous avions repris le fil de la circulation.
La deuxième fois, je ne rêvais plus : elle était assise dans la rue, près de Marine Drive, quartier huppé du sud de Bombay. Encore une fois, c’est son regard qui m’a percé. Je me rappelais la couverture du « National Geographic » il y a une vingtaine d’années, le regard de cette fille afghane, bleu acier comme on en voit rarement. Je rêvais en secret de tomber sur un regard comme celui-ci un jour de ma vie. Je me demandais simplement si elle accepterait la photo. Elle ne disait rien, du moins elle ne disait rien avec des mots. Seuls ses yeux parlaient. Les yeux d’un félin, verts et gris, minéraux. Des yeux perçants. Et en même temps d’une incroyable douceur. C’était vrai : on peut lire à travers les yeux des personnes rencontrées. L’oubli est alors impossible.
Dans les yeux de cette femme pachtoune, je voyais son âme.
Quant aux miens, on aurait pu y voir battre le cœur, qui mesurait sa chance. J’ai pris la photo, et d’ailleurs elle est légèrement floue. J’avais peur de voler le secret qui la rendait si étrangère à la scène.
(Pachtouns : tribus du nord-est du Pakistan et du sud de l’Afghanistan)
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