Le tour du monde, en charentaises
26 Janvier 2013 , Rédigé par Fred Sabourin Publié dans #l'évènement
réactualisé le 29/01/2013
(c) Vincent Curutchet
François Gabart, bizut du Vendée Globe, a donc franchi la ligne d’arrivée en premier, dimanche à 15h18, aux Sables d’Olonne. Ce Charentais, natif de Saint-Michel d’Entraygues, c’est-à-dire, pour les autochtones dont je suis, de l’hôpital de Girac, juste de l’autre côté de la limite avec Angoulême, a réussi un exploit. Le tour du monde en moins de 80 jours, à seulement 29 ans, pour sa première participation à la grande course en solitaire. Jules Verne doit se retourner dans sa tombe, et avec lui un paquet de matelots et capitaines qui reposent au fond des océans.
Ce marin à la gueule de gendre et de mari idéal (mais capable de supporter 78 jours de solitude en mer sans femme ni enfant ni chien, c’est dire s’il ne faut sans doute pas trop l’emmerder dans la vie normale), porte un patronyme pourtant bien mal orienté vers la course au large et la vitesse. François Gabart a un nom homonyme de la célèbre barque à fond plat, servant au transport de marchandises sur la Charente (et dans tout le sud-ouest de la France, notamment la Dordogne). François Gabart porte un nom de bateau qui avance lentement, sur un fleuve qui ne l’est pas moins, au bord duquel il a vu le jour. Ce n’est pas un de ces Bretons têtus et taiseux qui donnent généralement des skippers d’exception. Pas de prénom en « ïc » ni de nom en « ec ou ach ». Ce n’est pas non plus un de ces Britanniques obligés de savoir naviguer pour s’extraire de l’île où ils ont hélas vu le jour. Non. Il s’agit de François Gabart, comme la gabare, barque à fond plat servant au transport des marchandises. A-t-il déjà posé son pied sur celle amarrée à Saint-Simon, village gabarier, près de la maison de ses parents (Angeac-Charente) ? Niché entre Angoulême et Jarnac, ce petit bourg est un charmant et typique exemple de ce que produit la Charente de plus pittoresque. Quelques maisons serrées autour de leur église romane. Une petite place entourée de marronniers. Une grand’rue traversante. Grâce à l’opiniâtreté de son maire, Jean-Jacques Delage, une gabare baptisée La Renaissance remonte et descend ce fleuve que le poète Claude Roy qualifiait de « fleuve heureux, ceux qui s’y baignent le savent bien. » Il a tellement raison, le bougre !
C’est ici, bien loin de Lorient, de la baie de Quiberon ou du Golfe du Morbihan, de la Rade de Brest et de Port-le-Forêt, que le jeune Gabart a rêvé de partir. Il aura fallu une traversée de l’Atlantique en suivant les Alizés en 1989 avec ses parents et ses deux sœurs pour que le virus ne le lâche plus. Arrivé aux îles du Cap Vert, il scrutait l’horizon à la recherche des premiers concurrents du Vendée Globe.
Il me plaît à penser que ses premiers ronds dans l’eau furent sur le fleuve Charente, oui, le fleuve car il se jette directement dans l’Océan voyez-vous, La Charente, et non les Charentes comme on l’entend bêtement trop fréquemment sur les ondes de grandes radios nationales…
François Gabart, tu vas pouvoir mettre tes pieds dans tes charentaises en arrivant – enfin un endroit de sec ! – tu pourras peut-être tremper tes lèvres dans un cognac, et, savourant la précieuse eau-de-vie, te dire comme on dit au pays : « Chuis beun’aise ! »*
* beun’aise : être bien, tranquille, paisible, « bien aise ».
- La Renaissance -
- A Saint-Simon -
- A Grave -
- A Coursac -
- A Guissalle -
(c) Fred Sabourin
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