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Le jour. D'après fred sabourin

La BD est fâchée !

1 Février 2015 , Rédigé par Fred Sabourin Publié dans #l'évènement, #Presse book

 

 

SAB 1985 R

 

 

Pendant le Festival de Bande dessinée d’Angoulême, environ 600 auteurs, scénaristes, coloristes, ont battu le pavé lors d’une marche. A l’origine de cette manifestation inédite, une réforme du régime de retraites qui ne passe pas.

 

C’est la révolte des petits Mickeys ! Imaginez environ 600 auteurs, scénaristes, coloristes de bande dessinée, en train de manifester. " La BD est fâchée, la BD est fauchée ! " pouvait-on entendre dans la manif. En tête de cortège, des têtes connues du monde du 9e art : Lewis Trondheilm, Pénélope Bagieux, André Juillard, Boulet, Fabrice Neaud, Benoît Peeters… Organisée par le SNAC BD (Syndicat national des auteurs de bande dessinée), cette manifestation s’est déroulée dans un esprit bon enfant, samedi 31 janvier à Angoulême, en plein 42e Festival. La veille, déjà, des " états généraux de la BD " avaient réunis 300 personnes dans la salle Nemo de la CIBDI (Cité internationale de la bande dessinée) pour faire le point sur une profession finalement méconnue, et confrontés à de nombreux problèmes. Paupérisation des auteurs de bande dessinée, droits d’auteurs menacés par Bruxelles, diffusion des albums BD (5000 sorties en réforme du 700 il y a 20 ans), et régime des retraites. C’est surtout cette dernière inquiétude qui a fait débordé le vase : une réforme du RAAP (Régime de retraite complémentaire des artistes et auteurs professionnels), proposée par le gouvernement, un peu sortie de nulle part et sans concertation selon Fabien Vehlmann du SNAC BD, propose une augmentation de 8 % ce qui équivaut à un mois de salaire environ pour des auteurs qui vivent déjà très chichement (lire l'encadré statistique). " Il y a 1500 auteurs qui tirent un revenu de leur art. Parmi eux, une cinquantaine de vedettes, 100 à 200 classe moyenne, les autres vivent d’un Smic et encore souvent moins ! " explique Benoît Peeters, qui collabora longtemps avec François Schuiten aux éditions Casterman.

 

Troisième place au PIB

 

Réputé pour son individualisme et son manque d’organisation, le petit monde de la BD a tout de même prouvé le contraire, lors de cette marche pacifique qui s’est conclu devant l’hôtel de ville d’Angoulême, où Fabien Vehlmann, scénariste, a lancé un appel au Président François Hollande, appel qui a du raisonner aux oreilles de sa ministre de la Culture Fleur Pellerin, en viste au FIBD dimanche 1er février. " Dessiner n’est pas anodin, ce qu’on fait a un sens. Les attentats contre Charlie Hebdo sont une violente et aberrante piqure de rappel ", a-t-il lancé en préambule, sous la façade de la mairie où est accrochée une banderole rappelant le nom des victimes de ces attentats. " Monsieur le Président, nous vous demandons de négocier avec les vrais partenaires sociaux : les représentants des auteurs et artistes. Les 8 % demandés, c’est trop ! Monsieur le Président, faut-il vous rappeler que les auteurs et les artistes, outre leur importance symbolique et culturelle sont aussi à l’origine d’une richesse économique qui confère au secteur la 3e place au PIB, devant l’industrie automobile. "

 

Les auteurs de bande dessinée restent mobilisés en attendant, espèrent-ils, un nouveau dialogue, lassés de ne pas être entendus depuis 6 mois. Il serait étonnant que vendredi 6 février à Blois, lors de l’inauguration de la Maison de la Bande dessinée, la révolte des petits Mickeys ne trouve pas un écho de la marche de sa grande sœur angoumoisine.

 

F.S

 

 

La BD en chiffres (2014)

 

• 2 % de baisse de chiffre d’affaires dans l’édition de la BD en 2014 par rapport à 2013.
• 35 millions d’albums vendus.
• 409 millions d’euros de recette, 5.500 albums publiés.
• 232.000 exemplaires : la plus grosse vente (le dernier album de la série Black & Mortimer).
• 349 éditeurs de BD.
• 1 % de la vente en digital (3 à 4 % pour le livre).
• 1500 auteurs tirent un revenu de la BD. 500 en vivent exclusivement. 200 auteurs vivent à Angoulême.

(source : Charente Libre)

 

 

 SAB 1956 R

                                 - Marche des auteurs : "la BD fâchée, la BD, fauchée" -

 

 

 

Le point de vue de Bruno Génini

 

Le directeur du festival BD Boum à Blois réagit à la marche des auteurs du festival d’Angoulême.

 

La Renaissance du Loir-et-Cher : que pensez-vous de ce qui s’est passé ce week-end à Angoulême ?
Bruno Génini : Depuis quelques mois les auteurs se mobilisent. On est solidaires avec eux. Au festival de BD de Saint-Malo (Quai des bulles, 10-12 octobre derniers), il y a déjà eu un débrayage des auteurs. Le président de l’association BD Boum, Jean-Pierre Baron, avait assisté à leur rencontre. Mais le dialogue était encore ouvert avec la ministre Fleur Pellerin, qui venait d’arriver. Du coup à BD Boum ils n’avaient pas fait d’action. On avait cependant laissé la parole au SNAC BD lors de l’inauguration.


LRLC : Où est le problème selon vous ?
B.G : Le secteur de l’édition de bandes dessinées est très concurrentiel, et c’est la loi des plus forts. Delcourt a racheté Soleil. Paquet a racheté Proust. Glénat s’est offert Vents d’Ouest. Dargaud-Dupuis-Lombard forment un seul et même groupe. C’est la course à l’échalote. Il y a trop de sorties, trop d’offre et beaucoup d'albums se retrouvent au pilon sans presque avoir eu le temps de se défendre chez les libraires. Une planche qui se vendait entre 300 et 400 € jusqu’à une période récente se vend désormais 150 €. Or un auteur, pour exister, il faut qu’il soit publié. Les éditeurs fonctionnent par coups. Ils sortent plein d’albums, et voient ce qui marche ou pas. Si ça ne marche pas tant pis, si ça marche, tant mieux. Pour un auteur, dans ce contexte, ça devient difficile de négocier. Après, il faut aussi remarquer que des éditeurs plus petits travaillent de manière plus conventionnel, à l’ancienne si j’ose dire. C’est mieux pour les auteurs.


LRLC : Et maintenant, quelle suite ce mouvement peut-il prendre ?
B.G : Il y a deux choses. La première concerne le régime de retraite, qui a mis le feu aux poudres. C’est une négociation entre les représentants d’une profession et le ministère. La deuxième chose, plus largement, concerne la paupérisation d’une profession. Mais la balle est dans le camp des éditeurs. La logique économique a pris le pas sur la logique artistique. C’est dommage et il faut réfléchir à ce qu’on veut pour l’avenir de cette profession.
 

Propos recueillis par F.S.

 

article paru dans la Renaissance du Loir-et-Cher du 06/02/2015  

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