Camille Lepage, photojournaliste (1988-2014)
15 Mai 2014 , Rédigé par Fred Sabourin Publié dans #édito, #Presse book
(c) LP
Alors qu’elle effectuait un reportage en République centrafricaine, au sud de Bouar, la jeune photographe Camille Lepage a été tuée dans l’exercice de sa profession le 13 mai dernier. Elle avait 26 ans.
Comme il a déjà été écrit ici sur ce blog, Journaliste, c’est un métier . Encore une qui tombe sous les balles de gens mal intentionnés qui cherchent à éliminer ceux qui témoignent, parce que c’est leur boulot, parce qu’ils aiment ce boulot, parce qu’on ne le fait pas par hasard. Camille Lepage, qui avait, entre autre, effectué un stage d’études chez nos confrères de Rue89, avait écrit dans sa lettre de motivation qu’elle « s’orientait vers le journalisme indépendant, avant tout parce que, selon elle, c’est le seul digne de ce nom. » Elle l’a payé de sa vie.
Comme il a déjà été écrit sur ce blog, on n’est naturellement pas obligé d’aller pointer les objectifs de ses boîtiers photos dans des endroits où vous ne mettriez même pas une phalange. Evidemment, être localier dans une rédaction microscopique d’un département qui ne l’est pas moins représente infiniment moins de risques (encore que, ça dépend à qui on s’attaque…). Certains diront qu’on ne fait pas le même métier, je crois que si, pourtant.
Comme une actualité chasse l’autre – médias girouettes, il faut bien becter – on a entendu sur l’antenne d’une radio nationale une certaine Ségolène Royale, ministre de l’Ecologie (ça n’est pas une blague) dire au sujet de propos qu’elle avait tenus dans l’hebdomadaire Paris-Match, et qui ont créé une polémique, « que c’est le propre des médias de déformer les propos en les sortant du contexte des interviews. » Naturellement, je ne nie pas qu’il peut arriver à certains d’entre nous, pour tout un tas de raisons qu’il serait long d’énumérer ici, de dire ou faire des conneries, par lassitude, manque de temps, étourderie, ou assez souvent aussi sur ordre d’une hiérarchie journalistique qui passe beaucoup de temps penchée au dessus de tableurs excel ou en stériles réunions, qu’ils en perdent le sens des réalités du terrain, qu’ils ont pourtant arpenté, autrefois. Naturellement, il peut aussi arriver de dire ou faire la même chose quand on est homme ou femme « politique, » ministre etc. Le mépris avec lequel certains disent souvent : « ah, vous, les journalistes… ! » n’a d’égal que celui que nous pouvons parfois, in petto leur renvoyer à ce moment-là.
Que tous ceux qui fustigent la profession se rassurent : il n’y a pas que les plans sociaux pour faire disparaître les journalistes, reporter, photojournalistes… Certains, sur le continent africain, en Syrie, et pas mal d’autres trous à rats du monde, s’évertuent à participer à cette action destructrice, lente, mais sûre, avec une culasse et une queue de détente.
Camille Lepage était visiblement une professionnelle passionnée, acharnée, au sourire enjôleur. Elle faisait des photos superbes, d’un grand talent, qui montrait quelque chose, racontait une histoire. Ce beau sourire de jeune femme pleine d’avenir a pris quelques balles dans un pick-up, et on parle déjà d’elle au passé.
Indépendante, assassinée, par des assassins.
Prochainement, pour changer de sujet et retrouver un peu de légèreté, je vous parlerai ici d'Henri d'Aulnay-Pradelle, un des héros de l'épatant roman de Pierre Lemaitre, Au revoir là-haut, prix Goncourt 2013.
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